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REVUE DE PRESSE

Les violences urbaines

NOUVELOBS.COM | 07.11.05 | 06:18

Voici les éditoriaux consacrés par les quotidiens du lundi 7 novembre aux violences dans les banlieues.

LE FIGARO
Yves Thréard

"(...) La France paye aujourd'hui son arrogance. Aux yeux du monde, son fameux modèle d'intégration est en train de partir à vau-l'eau. (...) La vengeance est un plat qui se mange froid. Les Américains n'oublieront jamais les propos peu flatteurs tenus sur leur pays et leur société au moment de la guerre en Irak et du passage du cyclone sur la Louisiane. Leur analyse n'est pourtant pas dénuée de perspicacité. Elle souligne l'échec de quarante ans de politique. Si la France n'est pas en guerre, elle est plongée dans le bourbier de ses incohérences, de ses contradictions. Trop souvent, la démagogie l'a emporté sur la raison pour régler le problème dit des banlieues. De plans d'urgence en programmes de rénovation, les moyens ont rarement suivi les intentions. Surtout, il est illusoire de penser que quelques mesures techniques donneront fierté et espoir à nombre de Français issus de l'immigration que trop de discours lénifiants ont davantage présentés en victimes qu'en citoyens responsables. Il n'est pas de modèle d'intégration exemplaire.
Mais la France a abandonné le sien en cédant à la facilité et à quelques préjugés communautaristes. Elle ne cesse de faire des 'jeunes' des cités des Français à part. (...) La solution semble être plutôt dans la réaffirmation des droits et devoirs de chacun, et communs à tous."

LIBERATION
Jean-Michel Helvig

"(...) Quand l'Etat fout le camp, c'est au chef d'abord qu'il convient de demander des comptes, même si l'on est déjà au-delà du registre habituel de l'interpellation partisane. Car ce qui apparaît au fil de ces jours d'émeutes c'est l'invraisemblable gâchis d'une politique de sécurité intérieure livrée sur plusieurs années aux aléas de la démagogie électorale, aux stop-and-go des priorités ministérielles. Sur ce plan, la droite qui en fit commerce politique en 2002, pour ne pas remonter plus loin, est doublement coupable, pour avoir brisé l'implantation d'une police de proximité, et pour avoir étranglé financièrement les actions municipales et associatives dont l'objet est de maintenir ce 'lien social' sans lequel tout se délite. Mais la gauche ne serait pas quitte de ses propres responsabilités en s'en tenant à une promesse d'alternative.
Car ce dont ce pays a besoin c'est avant tout d'une continuité politique dans un domaine de sécurité publique qui suppose un socle durable de consensus, auquel chaque camp pourrait apporter des inflexions propres mais pas de remises en cause radicales sous forme de pseudo-grands soirs législatifs. Après tout, cela existe pour la défense nationale, et cela serait impensable pour la défense civile des citoyens ? Comparaison vaut ici raison."

LA TRIBUNE
François-Xavier Pietri

"(...) Au fil des onze nuits d'émeutes, qui sont allées jusqu'à gagner le coeur de la capitale, l'équipe de Dominique de Villepin a semblé avoir systématiquement un train de retard, d'abord en s'enlisant dans la rivalité gouvernementale, puis en mettant en avant la nécessité de faire respecter l'ordre républicain sans pour autant assortir le propos de solutions concrètes sur le terrain propres à déminer la situation. (...) Comment, en effet, ne pas se rendre compte que depuis plusieurs années certaines périphéries urbaines se sont organisées en marge de la société.
Des zones de non-droit tenues par des mafias locales manipulatrices qui depuis longtemps usent et abusent de la fragilité des personnes et des organisations pour développer une économie parallèle, fondée sur les revenus de la drogue, faite de trafics en tous genres, de rapines et de travail au noir. (...) Aujourd'hui le couvercle de la Cocotte-Minute explose. Avec ses possibles dégâts collatéraux, tant sur le plan de la politique intérieure que sur l'image de la France à l'international. Pour Jacques Chirac, la partie ne sera pas facile. Quelles que soient les mesures annoncées, chacun sait que cette question des banlieues sera longue à régler. Et les recettes miracles, en la matière, font rarement de l'effet."

LES ECHOS
Gilles Sengès

"(...) Depuis les premiers incidents survenus au quartier des Minguettes, à Vénissieux, qui datent de plus d'une trentaine d'années, les gouvernements de tous bords, qui se sont succédé ont bricolé des réponses jouant tantôt de la carottte, tantôt du bâton, s'attachant avant tout à éteindre les flammes et à balayer les cenres soigneseument sous le tapis en laissant éventuellement le soin aux autres de procéder à un nettoyage définitif.
(...) Derrière les flambées de violence auxquelles on assiste ces jours-ci ressurgissent des thèmes de fond qui n'ont jamais vraiment ét traités à la racine, comme les ratés de l'intégration, l'émergence et la montée du communautarisme, les limites de l'immigration, dossiers qui sont aujourd'hui devenus brûlants aujourd'hui."

FRANCE SOIR
Arnaud Dingreville

"(...) D'explosive, la situation est devenue éruptive. Sarkozy sort toutes les nuits sur le terrain mais son discours passe moins bien et parfois même agace. (...) Tout cela tourne d'autant plus au cauchemar que l'action policière et politique demeure inefficace. Le gouvernement joue-t-il le pourrissement ? Jacques Chirac a réuni le Conseil de sécurité intérieure puis a envoyé un message aux fauteurs de troubles. (...) Une réaction tardive et sans doute un peu brève pour rassurer une population exédée qui espère moins de ces effets de communication dominicaux que les effets réels d'une politique à long terme. Des cordons de CRS ne suffiront pas à réussir le grand défi de l'intégration."

LA CROIX
Bruno Frappat

"(...) Il y a longtemps que la politique a perdu de cette noblesse essentielle qui la justifie et qui consiste à éclairer le futur. Il y a longtemps que la République, prosternée derrière ses trois valeurs (...) se contente, pour les faire vivoter rhétoriquement, d'une pratique de saupoudrage de crédits invisibles à l'oeil nu et d'entretien coûteux d'une dépendance ressentie comme définitive. (...) Par-delà les épisodes quasi 'militaires' de la chronique de la dernière décade, l'on sent bien que la source des maux est l'impossibilité pratique, pour nombre de jeunes, de trouver à employer dans l'économie officielle, leurs forces, leurs talents, leurs ardeurs. (...) On ne boucle pas durablement et impunément une partie de la population d'un pays derrière les barrières de l'ennui, de la non-insertion et du mépris vaguement teinté de soutien social (...)."

L'HUMANITE
Pierre Laurent

"Les banlieues continuent de s'embraser, et le gouvernement, lui, continue de ne rien faire, si ce n'est dramatiser. En dix jours d'émeutes, pas une seule mesure annoncée pour ramener le calme et répondre aux urgences, pourtant si nombreuses, de ces quartiers et de leurs populations.
La convocation par le chef de l'état, hier, du Conseil de sécurité intérieure, est un pas de plus dans la mauvaise direction. En criminalisant la crise, il cherche à fuir les responsabilités de l'état, qui sont plus grandes que jamais. (...) Les banlieues et leurs habitants sont plus que jamais dans l'urgence. Le retour au calme appelle des mesures de sécurité publique efficaces, qui doivent notamment viser la protection des établissements et équipements publics de ces quartiers. (...) Il faut évidemment craindre qu'à l'opposé de cela la droite, du chef de l' état au gouvernement en passant par l'UMP, mise sur le pourrissement de la situation pour diviser les populations et radicaliser sa politique. Le danger est réel, mais il peut être déjoué. Une donnée nouvelle s'affirme sur le terrain ces derniers jours. Très nombreux sont ceux qui tout, en refusant l'escalade des violences, ne veulent pas tomber dans le piège Sarkozy."

DERNIERES NOUVELLES D'ALSACE
Olivier Picard

"Il ne risque pas, lui, de déchaîner les passions, ni de choquer quiconque par ses excès de langage. Il ne risque pas, non plus, de marquer les esprits par la vigueur et l'inspiration de son intervention.
C'est avec une langue de bois brevetée par des années de métier que le président de la République s'est exprimé, hier soir, sur le perron de l'Elysée au terme d'un conseil des ministres extraordinaire consacré à la situation dans les banlieues. Jacques Chirac, dont la parole était très attendue depuis plusieurs jours, a semblé mettre beaucoup d'application pour que son intervention soit un non-événement absolu. (...) Le président a donc clairement choisi la prudence et la modestie. (...) Chaque nouvelle nuit d'émeutes met en évidence les limites d'une politique du coup de poing qui faisait encore rêver, il n'y a pas si longtemps, tout un électorat, notamment de droite, mais pas seulement... Voilà notre ministre-président au pied du mur, contraint à une discrétion inhabituelle qui l'oblige à mettre entre parenthèses, au moins pour le moment, sa chevauchée vers la présidentielle de 2007. Sarko est touché mais pas coulé. Invirable, il fait face, poings serrés, prêt à repartir plus fort après avoir traversé la tempête."

NICE-MATIN
Marc Chevanche

"(...) Il y a donc, désormais, deux soucis. Le premier est de restaurer l'ordre républicain.
(...) Le deuxième souci est autrement plus grave. Il porte sur les choix politiques de longue durée qui devront être faits si l'on entend se préserver d'irruptions futures de même espèce. Réaffirmer qu'il n'y a pas de territoire ou de population qui soit en marge des lois et des valeurs de la République est bien sûr nécessaire mais ne saurait être suffisant. Il faut désormais concevoir une grande politique économique, sociale, urbaine et culturelle propre à dissoudre les ghettos qu'un quart de siècle d'inconscience et de flottement politique a permis de constituer. C'est à cela que Jacques Chirac réfléchit. S'il hésite sur les solutions, et consent aux territoires perdus de la République, alors il faut tout redouter."

L'EST REPUBLICAIN
Chantal Didier

"Jacques Chirac a mis l'accent sur la nécessaire sécurité des biens et des personnes. Une façon de donner raison à son ministre de l'Intérieur, même si le chef de l'Etat a jugé indispensable de 'poursuivre l'effort engagé' en direction des banlieues. La situation invite de fait à s'interroger sur 'le modèle français d'intégration' dont chacun voit bien qu'il ne remplit plus ses fonctions.
A sa façon, Nicolas Sarkozy a posé la question en prônant de 'faire plus pour ceux qui en ont le plus besoin'. Les querelles politiques ont dénaturé la question. Il devient urgent de la reprendre avec sérénité et sans préjugés sur les réponses possibles. A quoi servent les colonnes du temple s'il n'y a plus de temple ?"

LA CHARENTE LIBRE
Jacques Guyon

"(...) Même si certains continuent à manier l'euphémisme en parlant 'd'incidents', même si on ne peut s'empêcher ici et là de critiquer la presse internationale qui va jusqu'à évoquer une possibilité de 'guerre civile' en France, il faut arrêter de se boucher les yeux. Il est inutile de nier que la France se retrouve face à de véritables émeutes urbaines. (...) Il y a eu une forme de pensée magique à croire qu'il suffisait de répéter à l'envi que notre modèle d'intégration "à la française" était le meilleur au monde pour que cela marche. On voit le résultat. Il reste que ce qui, aujourd'hui, constitue plus qu'un avertissement ne doit pas pousser à changer totalement de cap: on sait aussi où mène le communautarisme... Il ne faudrait pas non plus que l'urgence conduise à un énième pseudo 'plan Marshall' des banlieues.
Par contre, il devient plus que temps de changer de braquet si on veut enfin s'attaquer non pas à la 'fracture sociale', mais aux nombreuses fractures qui traversent notre pays. Pour cela, il faut mettre les actions en phase avec les déclarations._ Et cela ne vaut pas que pour les politiques. Tous les citoyens doivent se sentir concernés. Et donc responsables, à leur place, dans leur tâche."

LE REPUBLICAIN LORRAIN
Philippe Waucampt

"(...) Depuis hier, au moins, nous savons que Jacques Chirac n'était pas à Baden-Baden pendant ces onze jours où le sinistre s'est propagé de la périphérie parisienne au reste de la France. La défaillance du général de Gaulle fut passagère et suivie d'un sursaut national. L'absence de Jacques Chirac a été dramatiquement longue et s'est conclue sur un constat d'huissier: rétablissement de l'ordre et respect. Alors que la politique, au plus haut niveau, nécessite des sorciers sachant certes gérer le temps mais aussi fixer le cap et manier le verbe pour donner du sens à la vie, nous n'avons eu droit, en ces circonstances dramatiques, qu'à une aspersion d'eau bénite pour calmer l'incendie.
Le vide symbolisé par le silence présidentiel devenait de plus en plus dangereux pour la collectivité nationale. Mais la parole élyséenne n'a malheureusement rien apporté de plus que ce que le premier ministre et le ministre de l'Intérieur disaient déjà. Ainsi l'effet désastreux du mutisme élyséen est-il aujourd'hui suivi par l'effet tout aussi désastreux d'un verbe sans magie, sans charisme, sans message, déléguant de facto au chef du gouvernement le soin de personnifier l'exécutif et de donner une articulation à l'action de ce dernier."

LE JOURNAL DE LA HAUTE-MARNE
Patrice Chabanet

"(...) Soyons lucides, ce n'est pas un propos présidentiel qui va adoucir ou impressionner les émeutiers. Le silence du chef de l'Etat, jusqu'à sa brève déclaration d'hier soir, trahit plutôt la perplexité, pour ne pas dire le désarroi, d'un exécutif confronté à une adversité ingérable. On peut arrêter provisoirement la grève dans les transports marseillais par la menace d'astreintes financières. Rien de tel avec des bandes de voyous naviguant entre nihilisme et records de voitures brûlées.
Quoi qu'il en soit, et au-delà des clivages politiques, le retour à l'ordre ou tout simplement à la paix civile est une exigence qui doit s'imposer à tous. Si l'Etat perdait le contrôle de la situation, on risquerait très vite d'assister à l'affrontement de hors-la-loi avec des milices d'autodéfense. Ce qui, on en conviendra, ne serait pas un signe de bonne santé pour notre démocratie."

LE DAUPHINE LIBERE
Didier Pobel

"(...) On peut reprocher à Nicolas Sarkozy d'avoir joué avec les allumettes de la démagogie devant une télévision qui, même lorsqu'elle fait bien son boulot, transforme toujours à son insu les casseurs en héros. Mais ce n'est tout de même pas lui qui a créé les bombes urbaines, pas plus, ajouteront non sans malice ses détracteurs, qu'il n'a inventé la poudre. Là où les cités s'embrasent dans le grand bûcher de nos vanités, c'est un fragment du modèle d'intégration qui part en cendres. C'est aussi parfois le sens de la mesure qui se consume. Car si la France vit une poussée de fièvre, galopante et inquiétante, elle n'est pas encore en proie à une guerre civile, n'en déplaise à la presse américaine qui en oublierait presque Bagdad.
Sortant d'un silence embarrassé, Jacques Chirac a ramené hier soir la crise à ses vraies proportions. Reste que, s'il n'est pas suivi de mesures appropriées, son très laconique appel au 'rétablissement de l'ordre public' est condamné, lui aussi, à faire long feu."

LE TELEGRAMME
Christine Clerc

"(...) Le moins que l'on puisse dire est que cet attentisme jette un grand trouble chez nombre de citoyens exaspérés par l'impuissance de l'Etat. Que fait donc le gouvernement ? Il se réunit. Pendant ce temps, le ministre de l'Intérieur va sur le terrain pour réconforter policiers et pompiers, mais plus discrètement. Serrant les dents, car une démission en pleine crise serait une désertion, Sarkozy médite sa revanche. En attendant, il fait intervenir des seconds couteaux. Une trentaine de parlementaires sarkozystes publient une lettre ouverte aux 'angéliques' : la culture de l'excuse systématique accusent-ils, a développé chez les délinquants un sentiment d'impunité absolue. (...) Entre les angéliques et les machiavéliques, il reste heureusement quelques hommes politiques responsables."

LIBERATION-CHAMPAGNE
Jorge d'Hulst

"(...) Alors que la planète se demande ce qui se passe en France, on ne peut pas dire que Jacques Chirac a su trouver les mots pour ramener le calme. Bien sûr, il a fait preuve de fermeté. (...) Pourtant, l'histoire est en train de le faire pour lui. Il y a dix ans, il a été élu pour réduire la fracture sociale. Une décennie plus tard, celle-ci n'a jamais été aussi importante comme le montrent ces émeutes. Le président de la République a au moins compris une chose. La fermeté ne suffira pas. Il lui faut aussi redonner une perspective à une partie de la jeunesse, celle laissée pour compte parce que l'ascenseur social ne fonctionne plus vraiment."

L'ALSACE
Patrick Fluckiger

"(...) En restant en retrait, et même si le gouvernement travaille d'arrache pied pour rétablir l'ordre, Jacques Chirac a instillé un désagréable sentiment de faiblesse de l'Etat : y a-t-il un pilote dans l'avion France ? Il a également offert libre cours à toutes les interprétations, et notamment à celles qui lui prêtent des arrières-pensées anti-sarkoziennes.
Le président, tout à sa politique d'encerclement de son ministre de l'Intérieur, rechignerait à tenir un langage de fermeté qui conforterait forcément son 'fils ennemi'. Ce sont là des spéculations dévastatrices... que Jacques Chirac peut faire taire en s'adressant, non pas à quelques journalistes, comme hier soir, mais à la France. Il était intervenu solennellement pour demander la libération de Florence Aubenas. Il doit le faire pour rappeler ce qu'est la concorde nationale, et comment il compte s'y prendre pour la rétablir. Ce serait à lui et non au Premier ministre de se présenter à la télévision, ce soir."

LA REPUBLIQUE DU CENTRE
Jacques Camus

"(...) L'autoflagellation de l'État (...) n'est pas la réponse à apporter à des débordements inacceptables. Comme les remèdes au mal-vivre des banlieues, promis par Villepin, ne seront pas instantanés, il va d'abord falloir que soit rétabli l'ordre républicain. Jacques Chirac, difficilement sorti de son embarras, s'y est dit résolu hier soir. Peut-être devra-t-il se résoudre, à court terme, à une mesure symbolique forte. La démission de Sarkozy en serait une.
Mais elle paraît impensable en ce qu'elle serait assimilée à une reculade, et pourtant... Le ministre de l'Intérieur, lui-même, a contribué à l'affaiblissement de l'image de l'État. Il s'est fait plus fort qu'il n'était."

LA NOUVELLE REPUBLIQUE DU CENTRE-OUEST
Hervé Cannet

"La contagion qui s'étend désormais aux villes moyennes de province porte évidemment la marque d'une fracture profonde dont personne n'avait suspecté qu'elle puisse un jour produire de pareilles douleurs. Les problèmes d'intégration (d'exclusion), de cités, de mixité sociale, de mal-être et de chômage dans les tours HLM ne datent pas d'hier et ne seront pas réglés en un coup de baguette magique. Jean-Louis Borloo, par ses mesures de cohésion sociale, est aujourd'hui davantage l'homme de la situation que Nicolas Sarkozy dont la personnalité (...) sert manifestement de chiffon rouge. Mais tous semblent pareillement dépassés par une situation explosive qui leur échappe et que les appels au calme et les effets d'annonce ne parviennent pas à maîtriser. Giscard a probablement raison : jamais depuis trente ans, la France n'avait paru aussi 'paumée' face à la colère de certains de ses fils.
Le langage de la fermeté est prioritaire pour un retour indispensable à une vie normale ; chacun comprend aujourd'hui qu'il est loin d'être suffisant."

LA REPUBLIQUE DES PYRENEES
Henri Jacques

"(...) La vérité est que la politique de sécurité publique mise en place après la réélection de Jacques Chirac et qui a consisté à faire l'inverse de ce qui avait prévalu avant, est un échec flagrant. Demander la démission de Nicolas Sarkozy, comme le font certains, fait partie de cette rhétorique politicienne dont on se gargarise volontiers pour faire figure d'opposant 'frontal'. (...) Car il n'y aurait pas eu la politique de sécurité aujourd'hui en cause sans l'assentiment, sinon l'inspiration de l'hôte de l'Elysée. Celui-ci, au onzième jour des violences urbaines qui se propagent en France, a réuni hier soir un Conseil de sécurité intérieure avec les membres du gouvernement concernés. Il était temps.
Reste à prouver que l'Etat peut reprendre la main, ou plutôt ne pas la perdre face à ce phénomène qui ne surgit pas de rien, qui est tout sauf imprévu depuis que des élus, des enseignants, des associatifs, mais aussi des policiers en sont depuis des mois, sinon des années, les prophètes alarmés."

LE PROGRES
Francis Brochet

"Qui a écrit : 'Dans les banlieues déshéritées, règne une terreur molle. Quand trop de jeunes ne voient poindre que le chômage ou des petits stages au terme d'études incertaines, ils finissent par se révolter. Pour l'heure, l'État s'efforce de maintenir l'ordre et le traitement social du chômage évite le pire. Mais jusqu'à quand ? Aucun désordre n'est à exclure quand les rapports sociaux se tendent. Ne laissons pas notre pays éclater en classes et en castes, avec des dignitaires arrogants, des parias désespérés et un peuple déresponsabilisé'. Alors, qui ? Jacques Chirac, en janvier 1995, dans 'La France pour tous'. On aurait dû l'élire Président, on n'en serait sûrement pas là."

LA PROVENCE
Georges Latil

"(...) C'est en quelques mots (trop courts) ce que le Président a résumé sur le perron de l'Elysée. Ce faisant, il n'a fait que la moitié du chemin.
Le premier pas, celui que nous souhaitions qu'il fasse. Il lui reste à accomplir le second. Le plus difficile. Nous parler longuement et, à défaut de nous séduire, de ne pas nous mentir. Assumer ses responsabilités, prendre en charge les intérêts de la Nation et de tous ses citoyens, jouer son rôle de chef. Ce pour quoi il a été réélu en 2002, fût-ce dans un contexte singulier. Le Général avait coutume de dire qu'une présidentielle était la rencontre d'un homme et d'un pays. Le pays attend. Pour l'heure, il devra se contenter des explications ce soir de M. de Villepin."

LA MONTAGNE
Dominique Valès

"(...) Cette crise majeure se trouve en effet au confluent des interrogations et des inquiétudes suscitées par les tranformations récentes de la société française. Immigration, intégration, communautarisme, chômage, délinquance, illettrisme, désintégration de la famille, violence : les mots, et les comportements qu'ils expriment, se bousculent en un mélange détonnant qui interdit de pratiquer un angélisme puisé dans une sociologie élémentaire tout autant que d'apporter de simplistes réponses sécuritaires.
Au delà de ses rivalités internes et de son souci de mettre en difficulté le gouvernement, le PS serait bien avisé de profiter de son propre calendrier pour essayer d'apporter sa pierre à la solution d'une crise dont on n'a pas fini de voir le bout."

LA LIBERTE DE L'EST
Gérard Noël

"(...) Pour l'heure, la polémique n'a pas lieu d'être. Au contraire, les responsables politiques doivent faire preuve de la plus grande responsabilité. Hurler avec les casseurs que Sarkozy doit démissionner, c'est, dans le climat actuel, la marque d'un manque de discernement. L'urgence pour l'Etat républicain est de maîtriser la situation, de ne pas abandonner le terrain aux émeutiers, et d'engager le dialogue (...) avec tous ceux qui oeuvrent pour empêcher que ces zones péri-urbaines ne sombrent dans l'abandon et le non-droit. Jacques Chirac a convoqué hier un conseil de sécurité intérieure. Enfin, serait-on tenté de dire tant le Président a paru en retrait ces derniers jours. Pourra-t-il faire l'économie d'un 'Grenelle des quartiers populaires', réclamé par des élus de Seine-Saint-Denis ?"

L'UNION
Jean-Michel Roustand

"(...) Les vraies victimes des violences urbaines tombent de bien plus haut, se comptent par milliers et se demandent sûrement si cette fameuse solidarité nationale, dont on leur parle toute l'année à propos de tout, ne pourrait pas aussi s'appliquer à leur voiture calcinée. Celle qui ne valait plus rien aux yeux des assurances mais qui avait l'inestimable qualité de rouler donc de permettre d'aller au boulot ou de transporter les courses. Il ne suffit pas de dire que la plupart des habitants des banlieues sont honnêtes et veulent s'en sortir par le travail. Encore faut-il leur tendre la main quand ils se retrouvent avec encore moins de choses le matin que la veille. Sans n'avoir rien demandé à personne. Sans non plus le droit de se défendre comme il a été rappelé à ce Soissonnais qui avait sorti un fusil pour protéger une voiture et qui a été interpellé. Uniquement parce que l'État n'a pas été capable de leur assurer la sécurité."

LA PRESSE DE LA MANCHE
Jean Levallois

"(...) Il y a donc des limites à la capacité de compréhension des personnes qui veulent bien admettre qu'il faut agir plus et mieux, mais qui n'acceptent pas la destruction des équipements construits avec leurs impôts. Dans l'urgence, il faut se donner des priorités. Au terme d'une réunion du Conseil de sécurité intérieur présidée par le président de la République, le retour à l'ordre a été défini comme une priorité absolue. D'autant que l'évolution en cours pourrait tourner à un conflit issu du communautarisme, ce qui irait à l'encontre des principes républicains. L'effort accru en faveur des secteurs défavorisés de nos ensembles urbains, trop souvent inhumains, n'est possible qu'après un retour au calme. On ne peut tolérer en aucun cas que la violence aveugle se développe davantage. Nous serions très vite en situation insurrectionnelle, ce que la République ne peut accepter. L'urgence est bien de mettre un terme à l'automutilation des banlieues. Mais, le calme revenu, tout restera à faire."

OUEST-FRANCE
François Régis Hutin

"(...) C'est notre société qui est mise en cause. Les politiques, qu'ils soient de droite ou de gauche, sont également responsables pour le passé. Aujourd'hui, ils doivent se montrer solidaires sans réticences dans cette tourmente pour, hors des polémiques qui ne servent à rien, unir leurs efforts et multiplier l'efficacité. Cela redonnerait confiance et contribuerait à réconcilier un peu la classe politique et les Français. Et puis, aussi, il faut bien se persuader que ces jeunes n'ont aucune perspective ; que si la société continue à leur envoyer des messages négatifs sur l'avenir catastrophique qui les attend, si elle leur donne l'impression de les mépriser, rien ne pourra se construire. Si, après la tourmente, on cesse de se préoccuper du problème, comme on l'a fait par le passé entre les diverses crises, la question reviendra aggravée. Il faut donc qu'elle soit abordée de front et traitée au fond avec les mesures et les crédits considérables qui seront nécessaires et, bien sûr, en agissant sur tous les plans dans la durée. Et que tout le monde s'y mette sans tout attendre de l'État."

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