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Evénement

Banlieues
Chirac pousse Villepin au front
Le Président a réuni hier un conseil de sécurité. Le Premier ministre doit «faire le point» ce soir «sur la situation» dans les banlieues.

Par Vanessa SCHNEIDER
lundi 07 novembre 2005



petit réveil au sommet de l'Etat. Il aura fallu attendre le onzième jour de la crise qui secoue les banlieues et un bilan particulièrement lourd (1300 véhicules incendiés dans la nuit de samedi à dimanche) pour que Jacques Chirac s'exprime publiquement. Hier, à l'issue du Conseil de sécurité intérieure qu'il avait convoqué quelques heures auparavant autour de Dominique de Villepin, de Nicolas Sarkozy et des ministres de la Défense Michèle Alliot-Marie, de la Justice Pascal Clément, des Finances Thierry Breton, du Budget Jean-François Copé et de la ministre déléguée à la Cohésion sociale Catherine Vautrin, le chef de l'Etat a prôné «le respect de chacun, la justice et l'égalité des chances» avant de poser «un préalable, une priorité : le rétablissement de la sécurité et de l'ordre public». Depuis le perron de l'Elysée, aux côtés de Dominique de Villepin auquel il a affiché ostensiblement son soutien, le Président a expliqué que «le dernier mot doit revenir à la loi. La République est tout à fait déterminée à être plus forte que ceux qui veulent semer la violence et la peur et qui doivent être appréhendés, jugés, punis».

Casting. Chirac n'avait pas dit un mot depuis son intervention lors du Conseil des ministres de mercredi, où il avait appelé à l'apaisement des «esprits». Des voix s'étaient élevées jusque dans sa propre majorité pour lui demander de s'exprimer à nouveau. Le député UMP Nicolas Dupont-Aignan (Essonne) avait ainsi regretté samedi qu'il soit «étrangement muet».

Dominique de Villepin sera, lui, ce soir au journal de 20 heures de TF1 «pour faire le point sur la situation». Hier soir, il a indiqué un «renforcement des forces de sécurité partout sur le territoire où cela est nécessaire» et annoncé que le gouvernement va «accélérer les procédures de justice» et «faire en sorte que les individus interpellés puissent être déférés devant les tribunaux en comparution immédiate». Il a également précisé qu'il dirait «aux Français les moyens que le gouvernement entend prendre et les mesures qu'il entend proposer pour avancer dans la République que nous souhaitons», celle de «l'égalité des chances».

Ubiquité. Tout le week-end, il a été en première ligne, multipliant les consultations. Il a réuni, samedi, huit de ses ministres à Matignon pour répéter un message de fermeté. Puis reçu le recteur de la Grande Mosquée de Paris, Dalil Boubakeur, pour, selon ce dernier, «exprimer à la communauté musulmane tout entière son estime, son respect». Hier, avant de convier des enseignants de quartiers sensibles, le Premier ministre a invité à 15 heures, en compagnie de Sarkozy, des policiers et des gendarmes «de tous rangs hiérarchiques» travaillant dans les zones urbaines sensibles. A la sortie, le ministre de l'Intérieur a réaffirmé que le gouvernement était «sur le pont à chaque instant» face aux violences urbaines. «La consigne donnée par le Premier ministre comme par moi-même, c'est toujours la même: ceux qui commettent des exactions auront à en rendre compte devant la justice», a-t-il martelé.

Le numéro 2 du gouvernement reste populaire même si ses méthodes sont contestées. Selon un sondage CSA dans le Parisien-Dimanche/Aujourd'hui Dimanche réalisé les 2 et 3 novembre (1), près d'une semaine après le début des violences, Sarkozy jouit d'une «bonne image» auprès de 57 % des personnes interrogées, mais, pour 63 % d'entre eux, il «utilise parfois des termes choquants». 73 % jugent ses interventions «trop médiatiques» et 66 % estiment qu'il met «trop l'accent sur la répression, pas assez sur la prévention».

Silence. Dans une «lettre ouverte aux angéliques et donneurs de leçons», rendue publique samedi, 30 parlementaires UMP (dont des proches de Nicolas Sarkozy comme Thierry Mariani ou Nadine Morano) accusent la gauche de «polémiquer, en pratiquant le mensonge et la désinformation». Pourtant, la gauche s'est faite discrète sur ce dossier ce week-end. La direction du PS refuse de demander «pour l'instant» la démission de Nicolas Sarkozy, a précisé son porte-parole Julien Dray. «Ce serait dire aux casseurs qu'ils ont raison», a-t-il estimé. Même le président de l'UDF François Bayrou, jamais en reste pour critiquer le gouvernement, s'est abstenu de l'enfoncer : «La situation [...] est suffisamment grave, inquiétante pour beaucoup de Français, pour qu'on y ajoute polémique et surenchère».

(1) Sondage effectué auprès d'un échantillon national représentatif de 1 002 personnes âgées de 18 ans et plus, selon la méthode des quotas.

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