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Clichy-sous-Bois cristallise les tensions politiques et sociales

LE MONDE | 01.11.05 | 12h30  •  Mis à jour le 01.11.05 | 14h36
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Entre les forces de l'ordre et les jeunes émeutiers de Clichy-sous-Bois (Seine-Saint-Denis) et Montfermeil, quelques dizaines d'adultes ont improvisé un service d'ordre explicitement musulman. Au milieu de la rue qui relie Clichy à la cité des Bosquets de Montfermeil, dans la nuit de lundi 31 octobre à mardi 1er novembre, ils font la circulation, discutent avec leurs "frères" et les gendarmes protégés derrière leurs boucliers. Quelques heures après les premières condamnations de jeunes gens interpellés au cours des émeutes des jours précédents, l'ambiance est électrique.

"Rentrez chez vous" , hurlent en direction des jeunes ces adultes, dont beaucoup portent une longue barbe et la tenue traditionnelle. Ils tentent de canaliser les assaillants en dressant un cordon vite dépassé par la mobilité des petits groupes qui circulent entre les immeubles mal éclairés. Pour la cinquième nuit consécutive depuis la mort de deux mineurs de Clichy électrocutés jeudi 27 octobre, des pierres et des bouteilles fusent en direction des forces de l'ordre qui ripostent avec des gaz lacrymogènes. "Ne tirez pas. On va prendre des pierres avant vous" , supplient les adultes devant les gendarmes.

Smaïn, un jeune homme d'une vingtaine d'années, fait des allers et retours entre les jeunes et les forces de l'ordre. "80 % des Clichois sont musulmans. Si on leur parle, ils nous écoutent, on peut les raisonner , assure-t-il. L'islam condamne la violence, que ce soit des voitures brûlées ou des agressions contre une mosquée." A ses côtés, Hassini Adef, 50 ans, veut croire en la capacité de l'islam d'apporter la paix. "Dans les années 1980, c'était beaucoup plus chaud ici. Aujourd'hui, quand on parle avec les jeunes, ils nous entendent."

L'épisode de la bombe lacrymogène qui a atteint, la veille, la salle de prière a accru la colère. "Si ça avait été sur une synagogue, qu'est-ce qu'on aurait dit. Tout le monde aurait crié au scandale !" , s'indigne un habitant de Clichy d'une quarantaine d'années qui ne veut pas donner son nom. Il défend les jeunes émeutiers et critique le service d'ordre : "Vous parlez de faire une marche, mais ça sert à rien. On a des papiers depuis des générations mais on n'est pas des Français comme les autres."

Un peu plus loin, côté Montfermeil, des jeunes incendient une voiture puis des poubelles. Lorsque les pompiers et les forces de l'ordre s'approchent, ils subissent des jets de projectiles. D'un immeuble voisin, on lance des objets, certains visiblement très lourds. "Ils ont touché à la mosquée et on ne peut plus rien faire", se désole un des "frères" du service d'ordre. Des gendarmes sont appelés en renfort. A plusieurs reprises, ils font usage des flash-balls pour repousser les émeutiers. Deux heures après le début des incidents, ils investissent des immeubles pour tenter d'accéder aux toits et procéder à des interpellations.

"HARCÈLEMENT"

Autour de la caserne des pompiers, boulevard Gagarine, les forces de l'ordre reçoivent également des projectiles. Vers 22 h 30, quatre adolescents sont interpellés. Assis par terre, en tailleur, adossés à l'un des portails métalliques de la caserne des pompiers, ils attendent, l'air hébété, que le fourgon arrive pour les embarquer. "On va se contenter d'un contrôle d'identité. Pas de garde à vue" , indique un des responsables de la police. "On a trouvé sur eux des foulards et ils avaient des gants qui sentent encore l'essence... Mais bon, ce n'est pas le moment d'en rajouter. Un gosse en garde à vue égale un martyr. Le quartier n'a pas besoin de ça" , poursuit le policier.

Le bilan de cette nouvelle nuit de violences urbaines est moins sévère que les précédents. Selon le décompte de la préfecture de Seine-Saint-Denis, 18 voitures ont été incendiées, contre une cinquantaine environ les deux premières nuits. Le garage de la police municipale de Montfermeil a également été incendié. Evitant de parler d'"émeute" , au motif que les affrontements directs ont été moins nombreux, la préfecture évoque des "actions de harcèlement" menées par des petits groupes de dix à quinze assaillants.

Quatorze interpellations ont été effectuées pour des jets de projectiles, destruction de biens, détention de substances incendiaires. Plus inquiétant, des incidents ont eu lieu dans plusieurs communes de Seine-Saint-Denis non concernées jusque-là, notamment à Bondy, Sevran, Aulnay-sous-Bois et Neuilly-sur-Marne. Au total, plus d'une centaine de véhicules ont été incendiés sur le territoire (Toulouse, Valence, Pau, Nanterre, etc.), dont 70 en Seine-Saint-Denis. En moyenne, une trentaine de cas sont recensés en France chaque nuit.

Les renseignements généraux craignaient une soirée très agitée du fait de l'accumulation des facteurs de tension. Le matin, le ministre de l'intérieur, Nicolas Sarkozy, avait confirmé que la grenade lacrymogène qui avait atteint la mosquée de Clichy, dimanche 30 octobre, correspondait aux modèles des CRS. L'après-midi, les familles des deux mineurs morts électrocutés avaient refusé de rencontrer Nicolas Sarkozy à la préfecture de Seine-Saint-Denis.

Surtout, les premières condamnations ont été prononcées à l'encontre de trois jeunes de Clichy accusés de violences contre les forces de l'ordre dans la nuit du 28 au 29 octobre. Agés de 20 à 27 ans, ils ont été condamnés par le tribunal correctionnel de Bobigny à huit mois de prison dont deux ferme. Dans une ambiance très tendue, les trois hommes ­ un Français, un Marocain en situation irrégulière et un demandeur d'asile politique originaire de Côte d'Ivoire ­ ont contesté avoir jeté des pierres ou des bouteilles contre les policiers.

L'audience de jugement de cinq autres jeunes gens a été repoussée au 7 novembre. Dans l'attente, ils ont été placés sous mandat de dépôt. "Vous nous envoyez en prison, vous n'avez pas de preuves" , ont hurlé les prévenus lorsqu'ils ont appris qu'ils devaient être incarcérés. Une bousculade a ensuite eu lieu pendant leur sortie de la salle d'audience.

Treize jeunes gens, interpellés samedi et dimanche au cours des émeutes à Clichy, ont été déférés lundi soir devant le parquet de Bobigny. Huit d'entre eux devraient être jugés mercredi, un autre convoqué ultérieurement. Quatre autres jeunes, mineurs, devaient comparaître mardi devant le juge des enfants. Six jeunes interpellés ont, en revanche, été remis en liberté.

Luc Bronner et Catherine Simon
Article paru dans l'édition du 02.11.05
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